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Sujet : 05-06-10

Puisqu’on me l’a plutôt gentiment demandé, ci-dessous un petit compte rendu de mon vol du samedi de la compète. Puissiez vous y trouver un peu de distraction en ces temps ma foi bien humides ou qui sait quelques infos pour un prochain vol.

Petit préambule pour le cas ou : j’ai choisi de ne pas voler la manche proposée parce que je privilégie par principe le circuitage les journées ou le vent le permet. Ceci étant, en tant que DE je n’aurai pas lancé un circuit, trop imprévisible ce jour là et aussi, au risque de paraître méchant, trop difficile étant donné l’objectif théorique d’un tiers des pilotes au but.

Décollage pendant le briefing, un peu tôt au vu des conditions mais la priorité était d’éviter la grappe, déjà que je n’aimais pas ça quand j’étais compétiteur …
Petite analyse rapide des conditions avant de partir : Gil Duplnd qui a décollé un peu avant n’arrive pas à monter, très mauvais signe. Autre souci le flux "en haut" est en SO et N en basse couche. Par contre point positif c’est visiblement faible à toute altitude. Coté convection la plaine semble encore bien morte et  les 1ers cums sont à plus ou moins à 15 bornes sur le plateau.
Donc à ce stade 2 hypothèses pour expliquer les conditions sur le site, soit il y a une légère inversion nocturne que la réchauffe n’a pas encore réussi à faire pêter dans la plaine contrairement au plateau et donc ça va venir, il suffira d’être patient. Soit c’est le grand classique de l’inversion de flux en S au dessus qui contrarie l’installation de la convection en brise de N ou d’O et là c’est potentiellement beaucoup plus gênant pour la plaine.

Je choisis d’être optimiste, de toute façon cette année il n’y a pas de quoi faire la fine bouche.
Comme prévu dans les 1eres pompes je ne fais pas mieux que l’ami Gil et l’équipe des dijonnais qui a décollé peu après. Tout ce petit monde semble peu disposé au circuit vu la dérive qu’ils acceptent dans les pompes. Il faut dire que je ne dois pas tellement leur donner envie vu le point bas que je me tape au retour d’une tentative devant pour essayer d’accrocher une pompe qui ne me recracherait pas trop loin derrière le site. Pourtant je ne sais que trop à quel point ça coule fort devant le site au retour comme ça quand il y a du sud au dessus (peut être un effet de déversement de ce qui serait obligé de passer par-dessus le relief aérologique).
Une fois cette petite chaleur passée, j’enchaine immédiatement une vraie montée dans un bon thermique avec en ligne de mire un peu plus haut les camarades sagement restés sur le site. Ils finissent tous par plus ou moins décaler "à plat" arrivés quelques dizaines de mètres sous le plafond. Visiblement personne ne veut partir le 1er. Le plus éloigné essaye même de revenir en se faisant appuyer au point de n’avoir que le choix de se jeter sur la face SE au dessus de chez Fournier. Comme par hasard il choppe une grosse mine et nous reprends plus de 500 m. Je choisis néanmoins par expérience de rester au nord des cumulus et de fait j’arrive le 1er aux barbules. 1er au plafond, au moins comme ça l’honneur est sauf ! J’aligne By sur le barreau entre mes petits petons et mes camarades en profitent pour lâchement m’abandonner à l’opposé. Petit moment de solitude en les voyant partir comme ça en une grappe bien homogène mais bon j’ai l’habitude, personne y m’aime d’abord.

Le "schéma" à partir de là avec un peu de nord normalement c’est d’aller refaire un plein dans le thermique des falaises d’Ivrey pour ensuite enchaîner sur le plateau de By. Le ciel est vide au dessus d’Ivrey quand j’arrive dans la zone. Bon pas grave c’est l’avantage d’avoir de la finesse par rapport à il y a quelques années, on n’est pas obligé de faire des arrêts pipi aussi souvent.
Malheureusement le plateau de By n’est pas beaucoup plus prolifique. Il y a certes des pompes au sud est du village mais même en s’appliquant très fort je ne passe pas les 1200 à peine plus que tout à l’heure sur le site.
A ce stade je ne peux plus me voiler la face, ça va être encore pire en descendant d’une marche dans la plaine. Mais bon j’ai annoncé que j’allais là bas et de toute façon si je reviens de suite sur le site je ne saurais pas trop quoi faire d’autre. Donc j’avance, dans un air très calme, très très calme. Je vais couler comme ça jusqu'à 50 mètres sol au dessus de l’embranchement de la route qui part rejoindre la 83 entre Montfort et Ronchaux. Il y a là un petit défilé avec un bout de falaise orienté plein sud et bien à l’abri. Le thermique partait vraisemblablement de là avant de se réalimenter je pense sur les "bosses au petit Bruno" à l’est de la nationale au sortir de Samson (c.f. Bruno Robert, deltiste émérite qui il y a quelques années a bien "défriché" ce coin).
Bon quand je dis que le thermique part, il faut entendre du 0,3 à recentrer plusieurs fois vers l’avant, 4 cycles en tout pour remonter à peine à 800. Ce qui vint donc malheureusement confirmer mon hypothèse de départ, à savoir que la tranche convective est scindée en 2 couches parce que 2 masses d’air différentes, à peu prés 500-600 m pour celle du dessous, épaisseur variable en fonction du lieu et de l’heure et donc de la puissance de la convection comme si celle-ci "rejetait" le sud en altitude ou peut être plutôt l’empêchait de descendre entre les noyaux. Le problème dans cette situation est qu’en descendant dans la plaine, les pompes s’affaiblissent et le plafond suit donc le relief au lieu d’au contraire offrir plus d’eau sous la quille. Qui plus est, ne me demandez pas pourquoi mais dans ce genre de régime de vent, ça coule toujours plutôt pas mal entre les pompes. Je crois d’ailleurs ne pas être le seul à l’avoir bien senti ce jour là. On m’a rapporté une belle tentative très courageuse mais totalement infructueuse sur Mouchard …

L’erreur à ne pas faire je crois dans cette situation est de se jeter sur la crête une fois un peu remonté. C’est tentant vu la forme presque en "combe" du relief à cet endroit surtout comme ce coup là avec un peu d’ouest dans le nord. Mais en l’absence d’un flux net bien marqué, le lift orographique est insuffisant, tout comme les éventuels déclenchements qui bizarrement ont tendance à très vite mourir. Il vaux mieux accepter de remonter marche après marche en exploitant tout ce qui passe même si c’est très lent (2 heures pour faire l’aller retour…) de manière à pouvoir accrocher avec un peu de hauteur les vrais bons déclenchements sur le plateau.
Pour moi ce jour là, ce sera "tout juste" en me conduisant à un nouveau point bas sous combe noire bien pire que le 1er (en dessous de la petite crête qui est elle même sous les gravières…)
Une fois raccroché sur le relief, la brise est faible et d’orientation NO. Pourtant  les pilotes qui dérivent le thermique décalent plus encore qu’au début du vol et surtout pratiquement plein ouest. Donc je ne cherche pas à exploiter les pompinettes qui décaleront d’autant plus qu’elles partent de la queue de la baleine (relativement à l’écoulement). Je re-avance jusqu’au déco NO avec dans l’idée d’aller chercher ensuite le thermique de méau.
1ere tentative avortée, le "cumulus" est vraiment trop moche. Petit rappel : au sein d’une même journée les thermiques ressemblent généralement au cum qui les coiffe. Si c’est moyen sous les beaux cum, gare aux formations trop échevelées.
Je ne refais pas plus de 1000 pour la seconde tentative. Ça part décidemment trop en dérive et il faut bien que ça serve de temps en temps d’avoir un avion de chasse !

Comme prévu la pompe de méau est du même acabit que dans la plaine (0,7 – 0,8) mais c’est pas grave il faut impérativement remonter là de manière à pouvoir aller raccrocher sous les beaux cums du plateau d’Ivory. Ça ressemble à un moment charnière, genre point clé. En fait à partir de là, mise à part une très bonne ligne à venir, toutes les situations seront du type ça passe ou ça pose, sans réel choix pour un plan B.

Une fois remonté vers 1400 je lâche l’affaire pour aligner un cum en milieu de vallée qui m’offre presque les barbules. Ce qui est heureux puisque bien évidement la 1ere rangée juste derrière la côte se désagrège avant que je ne l’atteigne. Je crochète donc vers un cum au sud ouest du begon parce que c’est l’extrémité ouest des matérialisations et que depuis un moment je sens bien une grande boucle Ivory - Pont d’hery en enfilade sous les cums pour l’aller et le retour sur Salins par la crête quand ça aura trop mouru dans le ciel.

Et de fait je vais comme ça faire une jolie séquence "je plane à mach 12, je suis trop fort, la vie est belle" tout entre 1600 et 1800 avec de grandes zones propices très larges rehaussées de joli noyaux à 3 m/s que je prends quand même jusqu’en haut même si c’est inutile parce que ça fait du bien de se mettre un peu au frais après avoir autant balayé la poussière paterre. Et ce jusqu'avant une dernière transition direction la lisière de la forêt à l’ouest de Pont d’hery. Je suis en effet déjà bien trop au sud pour rentrer en direct par le même chemin qu’à l’aller :  Signe évident de la décrépitude des conditions, les cums ont eu tendance à redisparaître d’ouest en est au fur et a mesure que je les quittais. Je suis donc contraint d’aller en chercher un dernier assez loin au sud ouest du village pour pouvoir refaire un plein (1500). Bien que le cum se déplaça lui nettement en SO, il m’occasionnera néanmoins une bonne dérive supplémentaire vers le sud jusque pile poil au dessus de l’embranchement de la petite route qui part sur Valempoulieres. Petit moment d’émotion puisque je ne peux m’empêcher de remarquer que j’ai du coup dépassé l’axe de la côte de l’heute, il est vrai touti riquiqui à cet endroit mais néanmoins bien visible dans la lumière rasante du soir. C’est symboliquement la frontière d’un autre domaine aérologique et c’est la 1ere fois que j’y mets le pied après avoir posé un bon premier jalon dans la vallée de Quingey.

Les cums à l’ouest ayant donc a peu prés disparus, ceux à l’est bien que très tentants sont trop décalés vis-à-vis de l’axe du retour. Je mets donc le cap sur la crête d’Aresches. Immédiatement les choses en reviennent à une réalité bien plus cruelle, ça contre et ça coule assez fort.
C’est dans ces moments là qu’on se félicite d’avoir une machine qui envoie ! A l’aller j’avais noté du coin de l’œil une barbule au dessus du sanatorium et de fait j’y trouve un thermique encourageant. Pas de plaf, faut pas rêver non plus, mais du thermique bien dru jusqu'à 1200. Le second partit vraisemblablement de la partie sud de la crête d’Aresches. Presque même plafond, même dérive en NO à remonter ensuite en appuyant bien. Le thermique suivant est évident dans la combe du boisset au nord qui est sous le vent de l’écoulement de la vallée. C’aurait donc du être une formalité encore que c’est pas la 1ere fois que je le loupe. Et paf au bout de 3 tours ça fait pschitt. Du coup je suis obligé de contourner par le dessous l’épaulement de Remeton puis en rase-motte tout en finesse le micro plateau qui lui fait suite. L’idée en désespoir de cause est comme lors de précédents passages de fureter au dessus de la pente orientée ouest qui descend jusqu’au fond de vallée. Et comme dans tout vol vraiment abouti, c’est le moment où dame nature se décide à faire un petit cadeau. La fumée en face du superU qui jusque là dérivait mollement dans l’axe de la vallée se renverse en ouest. Les feuilles des arbres de la haie sommitale commencent à me montrer leur petits dessous et les piafs sont de sortie. En fait non ces enfoirés ont bel et bien décollés une fois qu’ils m’ont vu commencer à tenir. Mais je leur pardonne bien vite vu qu’ils me dépassent immédiatement pour aller matérialiser un peu plus loin le vrai noyau.

Alors là bien sur accroché aux branches c’est le moment de la grande question existentielle : j’y vais, j’y vais pas ? Et une fois dans leur noyau: mais comment font-ils donc pour savoir que ca monte mieux là ? Eh bien je dirai : comme nous en fait. En mieux certes mais comme nous quand on va chercher la pompe sur St thieb parce que ça savonne sur le déco. En fait je pense qu’ils sont simplement du coin et qu’ils ont l’habitude c’est tout, avec juste de meilleurs perfs et des capteurs bien plus mieux bien.
Je soigne le thermique (0,7) mais c’est presque facile comparé au début du vol. Vers les 1100 ça calme et j’en ai assez pour repasser par-dessus la crête du Belin. Au moment de basculer je pense forcément à quelqu’un avec qui il y a quelques années on avait fait ce bout de retour comme ça, lui tout en bas et moi tout en haut, tout l’inverse d’aujourd’hui. Qui sait, peut être après tout dans ce genre de journée, on s’arrangeait toujours pour faire quasiment l’inverse l’un de l’autre tout en finissant pourtant généralement à peu prés au même endroit…

La fin du vol est une formalité, la pompe de la combe à coté du déco jusqu'à 1000 puis le thermique du pied de la face sud. Celui là c’est pas compliqué il est pile poil sur la trajectoire direction la croix merrin un peu avant de dépasser la croix de Poupet. Enfin toutes choses égales par ailleurs et puis quand ça veut bien, hein ? z’allez pas vous y coller avec 50 de nord non plus, ça risquerait de faire vilain.
Ca s’enfonce une fois repassé sous le nord-ouest. Je néglige les dernières petites effluves de convection sur cette face, pas fâché dans le fond de ne pas avoir à renoncer volontairement au posé en haut sans vent. C’est mieux pour les chevilles avec ce genre d’engin.
Allez courage bientôt le printemps …

Dernière modification par ppec (02-07-2010 09:52:44)

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Re : 05-06-10

Mon dieu ppec tu t'es déchiré !!! merci pour ce supère récit !
t'façon t'es un local et pour vous le parapente c'est dans le sang. moi je suis d'Alsace et c'est de la bière qu'est dans mon sang!

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Dans vol libre y a vol, un point c'est tout !

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Re : 05-06-10

on veut la même explication à chaque vol désormais !
et si possible en un plus approfondi :-)
sinon, pour les cancres, on peut avoir des cours de rattrapage et du soutien scolaire ?

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Re : 05-06-10

ben voilà, un peu de partage.
Merci pour le récit...